Home : Toni Morrison

Avant de dire quoi que ce soit sur le contenu, je dois dire que le style de ce roman est merveilleux. Ce roman court, à plusieurs voix, plusieurs points de vue, va droit au but, fait parfaitement vivre ses personnages les uns par rapport aux autres. Il y a une vraie concision dans le choix des mots, ils sont tous justes, pas une phrase en trop, on sent que ce qui est écrit devait être écrit comme cela et pas autrement… Il y a une vraie musicalité du texte, un caractère très « oral » : je l’imaginais d’ailleurs très bien lu à voix haute (pourquoi pas par Pierre-François Garel 😉 Je félicite au passage Christine Laferrière qui a traduit ce texte.
 
L’histoire est celle de la vie de Frank Money et de sa famille, de son enfance et de sa sœur, Cee,  dans un trou paumé des États Unis. Ce n’est jamais clairement dit mais on comprend que Frank est noir, on le ressent dans les rapports qui existent entre certaines personnes. L’histoire est celle de sa fuite en avant quand il a tout quitté pour échapper à une vie dans avenir et est parti à la guerre en Corée pour en revenir détruit. Au fil du récit, on va le voir se reconstruire petit à petit. Il s’agit d’un homme qui touche le fond et qui remonte à la surface, et les personnages qui gravitent autour de lui passent tous plus ou moins par le même processus, notamment Cee, qui elle-aussi évolue tout au long du roman. 
 
Ce sont des histoires subtiles de relations humaines, de rencontres et d’espoirs- d’abord écrasés puis qui renaissent. Ce n’est pas uniquement l’histoire des Noirs aux États Unis dans les années 50 mais la vie de ces personnages en particulier permet d’évoquer toute une population au sens large… C’est l’histoire de la famille que soit dans les belles relations ou dans les mauvaises. C’est aussi l’histoire de femmes, fortes malgré les difficultés auxquelles elles sont confrontées, solidaires aussi… 
 
p 53 : « Telle était, selon Cee, la raison pour laquelle elle s’étaie enfuie avec un salaud. Si elle n’avait pas été à ce point ignorante, à vivre dans un trou perdu qui n’était même pas une ville, avec seulement des corvées ménagères, une église pour école et rien, d’autre à faire, elle ne se serait pas laissée avoir. »
 
p 130 : « Il n’y avait rien de superflu dans leur jardin car elles partageaient tout. Il n’y avait pas d’ordures ni de déchets dans leur maison car elles savaient faire usage de tout. Elles assumaient la responsabilité de leur vie et de toute autre chose ou toute autre personne ayant besoin d’elles. Le manque de bon sens les irritait mais ne les surprenait pas. La paresse était plus qu’intolérable à leurs yeux : elle était inhumaine. Que l’ont fut au champ, à la maison ou dans son propre jardin, il fallait s’occuper. Le sommeil n’était pas fait pour rêver : il servait à rassembler des forces pour le jour à venir. La conversation s’accompagnait de tâches : repasser, éplucher, écosser, trier, coudre, réparer, laver ou soigner. »
 
p 133 : « Tu vois ce que je veux dire? Ne compte que sur toi-même. Tu es libre. Rien ni personne n’est obligé de te secourir à par toi. Sème dans ton propre jardin. Tu es jeune, tu es une femme, ce qui implique de sérieuse restriction dans les deux cas, ais tu es aussi une personne. Ne laisse pas Lenore ni un petit ami insignifiant, et surement pas un médecin démoniaque, décider qui tu es. C’est ça l’esclavage. Quelque part au fond de toi, il y a cette personne libre dont je parle. Trouve-la et laisse-la faire du bien dans le monde. »
 
Pour mon avis sur la version audio, cliquez sur la couverture 

avec SaxaoulMidolaMrs B , Valérie et Tiphanie… Allons voir leurs avis!

28 commentaires sur « Home : Toni Morrison »

  1. Je n’avais du tout aimé Beloved du même auteur et c’est pour ça que je ne l’ai pas choisi pour la rentrée de PM, je crois que j’aurais du …. maintenant je regrette

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    1. J’avais beaucoup aimé « Beloved » mais il est très particulier. Je pense que c’est le genre de roman où il faut connaître un peu le sujet des Noirs aux Etats Unis avant de le lire, en plus il y a un côté un peu imaginaire… Celui-ci est réaliste et plein d’humanité, on peut y découvrir beaucoup de thèmes! Je peux te le prêter si tu veux (il est léger

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  2. Je fais mon billet cet après-midi. J’ai beaucoup aimé mais ce n’est pas un coup de coeur parce que j’ai trouvé qu’il manquait une conclusion à la fin, celle-ci nous renvoie au début, c’est un procédé typique chez Toni Morrison mais j’aurais aimé savoir qui est l’homme en question, ou alors je suis passée à côté du livre, j’ai des soupçons mais j’aurais préféré que ce soit dit

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    1. Je vais vite aller te lire! La conclusion ne m’a pas manquée, j’ai trouvé que justement, les personnages était les mêmes mais complètement différents, ils avaient évolué tout en restant unis et c’est cet aspect qui m’a le plus marqué je crois.

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    1. Peut-être que tu en attendais trop alors que je n’en attendais rien je n’ai pas lu Toni Morrison depuis la fac alors je ne savais pas ce que je rencontrerai et je suis vraiment tombée sous le charme.

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  3. Je ne sais plus quoi faire avec ce livre, je crois que je préfère commencer par un autre titre pour découvrir Toni Morrison vu les quelques billets mitigés que j’ai lus

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    1. Franchement, je ne peux que te conseiller de le lire car j’ai vraiment trouvé ce roman excellent! (et puis, dis toi qu’il est court, si tu n’aimes pas ce n’ai pas trop long

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  4. Effectivement, ce roman doit très bien passer à voix haute. Et moi, je file rajouter le nom de la traductrice que j’ai oublier de mentionner dans mon billet. Que ferions-nous sans eux ?! (moi surtout

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    1. En fait, je remarque souvent les traducteurs quand ils sont moyens! Mais là, j’ai trouvé que le rythme et la musicalité du texte était bien rendu en français alors je pense que la traductrice n’a pas trahi l’auteur

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    1. Tu sais où il est dès que tu le veux (ça me fait penser que je pourrai le faire voyager aussi car il est assez léger pour la poste!) Il est court, je l’ai lu d’une traite entre la maison et Lille Tu seras la prochaine à le lire

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    1. J’avais un souvenir très fort de « beloved » qui est un livre très particlier. Celui-ci est beaucoup lus abordable, je suis contente de l’avoir redécouverte! je vais continuer avec « un don ».

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    1. Valérie a pensé la même chose, mais comme je n’ai pas vraiment lu de gros romans d’elle, je n’ai pas de comparaisons… je me dis qu’elle me plaira aussi bavarde! Je vais a découvrir mieux c’est sûr!

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  5. Une auteure que je mets souvent en lien avec Maya Angelou, qui a écrit de fabuleux livres sur ce sujet. Ce billet donne envie de replonger dans l’univers de Toni Morrison. Commentaire très intéressant sur la lecture à voix haute. A bientôt,

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    1. Bienvenue ici! De Maya Angelou je ne connais que 2 volumes de son autobiographie que j’ai lu et aimé comme des romans et je me dis qu’il faudrait vraiment que je lise sa fiction! J’ai lu tout Alice Walker à l’poque de mes études et je trouve que ces auteurs, ces femmes noires américaines ont vraiment des messages forts à faire passer à toute la société! En ce qui concerne la lecture à voix haute, je sortais juste de l’écoute de « La mort du roi Tsongor » et la manière de lire de l’acteur résonnait encore en moi en lisant « Home » (j’ai même suggéré aux Editions Thélème de l’enregistrer

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  6. Bonjour ennapapillon, comme toi, j’été enthousiasmée par le style et la traduction est remarquable. C’est le premier que je lisais de cet écrivain, j’espère que cela ne sera pas le dernier. Bonne après-midi.

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    1. J’ai moi aussi très envie de poursuivre la découverte de cette auteur, dont je connaissais quelques titres mais que je n’avais pas lu depuis longtemps! Bonne soirée!

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  7. Que d’avis positifs pour ce livre ! Le miens l’est aussi. Formidable d’apréhender autant de sujet et de les traiter avec autant de clareté et de profondeur sans pour autaut faire un pavé !

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