Samedi 12 mars, j’étais à Rennes pour le Festival Rue des livres, un salon du livre gratuit et à taille humaine où j’ai retrouvé le traditionnel groupe des « Blogueurs de l’Ouest » grâce à l’organisation toujours parfaite de Gambadou. Vous pouvez lire mes compte-rendus de 2011 , 2012 et 2014

Après avoir roulé dans un brouillard à couper au couteau, je suis arrivée à Rennes sous le soleil et j’ai d’abord retrouvé Sandrine à 11h. Puis nous avons été rejointes par Canel et son mari et Géraldine. Peu de temps après, Gambadou est arrivée avec le groupe de voyageurs en train: Sylire, Claire, Yvon et sa femme.
Nous avons fait une petit tour dans le salon : j’en ai profité pour aller saluer Sorj Chalandon et faire dédicacer son dernier livre. La discussion a été sympathique mais il faut que je me rende à l’évidence : il ne se souvenait pas de moi 😉

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Pour être honnête, notre premier petit tour dans le salon a surtout été une excuse pour nous arrêter toutes les 5 minutes pour bavarder entre nous de tout et de rien et beaucoup des livres que nous voyions sur les stands (heureusement que nous n’avons pas acheté tous les livres recommandés par les unes et les autres 😉
Je suis allée faire un tour du côté des stands de littérature jeunesse et j’ai acheté un livre pour Bastien au titre qui me paraissait parfait pour cette journée sans Homme ni enfant : « Papa qui lit ». Charles Dutertre, l’illustrateur a fait une chouette dédicace et m’a dit que ce livre était une commande qu’il avait acceptée avec plaisir car lui-même étant papa de trois enfants, le sujet du papa qui lit l’histoire du soir lui parlait bien. Je lui ai fait remarquer que ses enfants avaient de la chance d’avoir un papa qui faisait des livres et il m’a dit que sa série « Louison Mignon » était basée sur sa propre fille qui est surnommée ainsi chez eux 😉


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Nous nous sommes ensuite retrouvés avec Antigone que je rencontrai pour la première fois (et avec grand plaisir car je la suis depuis très longtemps sur la blogo) et Yaneck que j’avais déjà rencontré en 2014.
Nous avons mangé ensemble dans une pizzeria non sans avoir papoté tout le long du chemin, de tout et de rien mais beaucoup de livres et de blogs 😉
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Un petit groupe est parti en avance pour aller écouter Sorj Chalandon parler de son dernier roman « Profession du père ».

Il a expliqué que dans ses romans il essayait de prendre de la distance car pour lui le roman a plus d’élégance que la réalité. Il a listé les choses dans le roman qui ne correspondaient pas à sa réalité, expliquant notamment que le personnage de l’enfant, Emile, était un mélange de son frère et lui. Il a dit qu’en étant Emile, il prenait une distance pour être « je » sans être tout à fait lui. Il se réappropriait Sorj.
Il a aussi parlé de son style aux phrases souvent courtes et a expliqué que ce n’était pas un « effet » mais une conséquence de son bégayement de l’enfance qui l’a toujours obligé à aller vers l’épure dans le langage. Un besoin d’aller là où le mot est le plus cru, le plus vrai. Un besoin que dans une phrase il y ait un monde entier. L’oralité et l’écrit passent pour lui par des phrases courtes et des points pour garder le sens du mot, pour ne pas trahir ses mots.
Quand il a parlé du sujet de son roman, il a expliqué que s’il avait pleuré en l’écrivant, il ne voulait pas pour autant qu’il y ait de larmes dans le texte. Il voulait qu’on puisse y trouver l’effroi qui empêche de respirer mais pas de larmes. Il voulait raconter l’épouvante pour qu’elle soit ressentie.
Il a aussi dit que pour lui, la violence physique était annexe, que ce qui était plus grave c’était que l’home qui portait les coups s’invente des vies et entraîne son enfant dans ces vies et que l’enfant devenait le véhicule des mensonges du père, tout le monde croyant que c’était l’enfant qui mentait, qui était dingue, personne ne pouvant imaginer qu’il y avait un adulte derrière. Enfant, il croyait jouer aux cow-boys et aux indiens mais à aucun moment le père ne disait qu’il « jouait », car lui « vivait » ces situations. Il a fait remarquer d’ailleurs au sujet du mensonge que son frère est devenu détective privé et lui journaliste : deux métiers qui recherchent la vérité.
Il a aussi parlé de sa famille. Expliquant qu’il avait déjà écrit sur son père (« La légende de nos pères ») mais que ce dernier après l’avoir lu n’avait absolument pas compris qu’il s’agissait de lui. Il a écrit « Profession du père » après la mort de son père, commençant littéralement à prendre des notes le jour de l’inhumation. Avant que le roman ne sorte, il l’a fait lire à sa mère et à son frère. Sa mère lui a juste dit qu’elle l’avait lu et qu’elle proposait qu’ils n’en reparlent plus jamais. Il a aussi raconté qu’après la mort du père, il pensait pouvoir atteindre sa mère mais elle restait ancrée dans l’image de son mari, ne semblant pas pouvoir lui faire le moindre reproche. Quant à son frère, il lui a dit qu’il avait beaucoup ri en le lisant. Récemment, son frère lui a avoué que lui, enfant, n’avait jamais cru les histoires du père et quand Sorj lui a demandé pourquoi lui le croyait, son frère a répondu « Parce que toi, tu l’aimais ». D’ailleurs, il dit que jusqu’au bout il a attendu quelque chose de son père et regretté aussi que sa mère ne lui fasse pas comprendre une seule fois que quoi qu’il se passe elle était là pour lui.
Cette entretien était assez drôle, beaucoup plus léger que les autres fois où j’ai assisté à des rencontres. Il a raconté avec beaucoup d’humour les vraies situations vécues avec son père, comme des histoires d’enfances ordinaires. Il a aussi plaisanté sur le fait qu’à chaque fois qu’il allait dans des salons ou des rencontres, il y a des psys qui lui donnaient leur carte en s’inquiétant de son étant mental actuel 😉 Il était plus drôle et léger mais il bégayait un peu vers la fin quand il parlait de sa mère, ce qui montrait quand même son émotion.
Et enfin, il a dit que concernant son écriture, il en avait fini avec la guerre, que l’Irlande était retournée dans la sphère privée car c’était maintenant uniquement en lien avec un pays et des gens qu’il aimait et qu’il avait fait le deuil du père. Il n’a écrit à ce jour qu’un seul roman complètement imaginaire (« Une promesse ») qui ne soit pas lié à des blessures personnelles et comme il ne se souhaitait pas d’autres malheurs, il y avait donc deux solutions maintenant : soit il arrêtait d’écrire complètement, soit il passait en fiction pure en quittant les blessures intimes.
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Après cette rencontre très intéressante, je suis allée voir Jeff Sourdin, un auteur que je voulais rencontrer depuis longtemps mais que je connaissais déjà pourtant… Il avait été prof stagiaire dans mon collège il y a très longtemps et je savais qu’il était aussi auteur mais je n’avais pas encore eu l’occasion ni de le lire ni de le voir depuis. Ce qui est très amusant c’est qu’il m’a tout de suite reconnue (alors qu’on ne s’était pas vus depuis plus de 10 ans !) J’ai beaucoup apprécié de discuter avec lui. Déjà, j’avais oublié que « Sourdin » était son vrai nom de famille (ben oui, on ne s’appelle pas M. Truc et Mme Machin en salle des profs, alors j’avais juste retenu son prénom) et j’étais persuadée que « Sourdin » était un pseudo car c’est le nom des habitants de la ville où nous travaillions à l’époque ! J’ai acheté son premier roman « Ripeur » dont Midola avait parlé chez elle et que j’avais envie de lire depuis très longtemps et son dernier « Pays retrouvé » pour lequel Midola a aussi eu un coup de cœur ! Nous avons parlé du collège, des anciens collègues, de nos vies actuelles et de la maison d’édition « La part commune » maison Rennaise qui fait de très beaux objets livres.



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Après avoir fait une petite pause avec mes copines blogueuses et reparlé de la rencontre avec Sorj Chalandon, j’ai été tentée par l’achat qu’Antigone avait fait d’un roman de l’auteur jeunesse Hubert Ben Kemoun, me rappelant que j’avais beaucoup aimé « La gazelle » et que comme je « collectionne » un peu les romans en lien avec la course à pied je voulais l’acheter. Cette rencontre a été très drôle ! Quand nous sommes arrivées avec Antigone, il était sur le point de partir. Mais je lui ai dit que je voulais acheter « La Gazelle » car je l’avais déjà lu et que j’avais aimé. Il m’a répondu que c’était un roman que lui aimait beaucoup mais qu’en général les gens n’aimaient pas car il ne s’y passait rien ! Je lui ai dit que moi qui courais, je trouvais au contraire c’était un roman très réaliste car quand on court de longues distances notre esprit vagabonde tout à fait comme ça. Il a dit qu’il était tout à fait d’accord avec moi et que seules les bonnes lectrices le voyaient (tout ça avec humour bien sûr !) Après il m’a demandé pourquoi je voulais acheter si je l’avais déjà lu. Alors je lui ai demandé lequel il me conseillait et il m’a dit « Lisez celui là ! » en montrant son dernier roman « La fille quelques heures avant l’impact » (qu’Aproposdelivres venait de lire justement et avait aimé). Il était encore pressé de partir et m’a dit faussement bourru « Je suppose vous voulez une dédicace ? » J’ai dit oui et il m’a dit : « C’est bien parce que j’ai repéré vos collants Mona Lisa » (Oui, j’avais des collants avec Mona Lisa dessus… tiens, tiens, comment a-t-il pu les repérer ? 😉 La conversation était vraiment drôle et plein de sous-entendus, j’ai adoré cette rencontre ! Nous avons pris une photo et je crois que ça se voit 😉 Juste avant de partir, il y avait un petit garçon qu’il semblait connaître pour qui il n’avait plus le temps de faire une dédicace (à cause de moi 😦 ) et il lui a dit très gentiment « Tu sais, ce n’est pas important la dédicace, ce qui est important ce sont les histoires du livres et puis, il faut que tu arrêtes de ruiner ta maman : emprunte les à la médiathèque » (et j’ai beaucoup aimé cette petite phrase !)


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Avant de rejoindre les autres, Antigone et moi avons craqué sur une petite revue « Pop Corn : La revue qui se fait des films » sur Star Wars pour nos fils réspectifs, dédicacée par Pauline Payen.
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Juste au moment où Sandrine et moi allions repartir, nous avons croisé Midola qui était venue avec son fils et j’étais vraiment très contente de la revoir !
Inutile de vous dire que j’ai adoré cette journée ! Elle tombait parfaitement à pic : après deux semaines d’arrêt maladie, j’avais un peu le moral en berne car je me suis sentie un peu isolée chez moi alors voir plein de têtes connues ou faire de nouvelles rencontres, papoter de livres et autres, rire et plaisanter m’ont fait beaucoup de bien ! Merci à tous pour votre bonne humeur et la passion des livres qui nous réunit!
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Je vous laisse avec des photos de groupe où nous montrons à quel point les blogueurs de l’Ouest sont sérieux (ou pas 😉
Cette année, il y avait (par ordre alphabétique et non d’apparition sur les photos) : Antigone (son billet sur la journée est ici), Aproposdelivres (son billet sur la journée est ici), Canel (qui est notre photographe) (son billet sur la journée est ici), Gambadou (son billet sur la journée est ici), Géraldine, Sandrine (son billet sur la journée est ici), Sylire, Yaneck (qui n’était pas là au moment des photos), Yvon (et son épouse Nicole).



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Et un petit clin d’oeil, le festival proposait de coller un post it avec un coup de coeur de lecture : moi j’ai noté mon dernier coup de coeur en date « Les gens dans l’enveloppe » de Isabelle Monnin.
Commentaires laissés à l’époque sur canalblog :
- Difficile de résister! par ennapapillon, dimanche 20 mars 2016